Discours veritable de l'execution faicte de plusieurs traystres et sedicieux de la ville de Rouen. Faict par le commandement de monseigneur le chevallier d'Aumalle, faict le vendredy 23 de fevrier 1590.
Saisie du texte et relecture : O. Bogros pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (04.XI.2004)
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Texte établi sur un exemplaire  (Bm Lx : Norm 1190) de l'édition donnée à Rouen en 1878 par l'imprimerie Espérance Cagniard pour le compte de la Société Rouennaise des Bibliophiles et publiée par A. de Bouis sous le titre Pièces sur la Ligue en Normandie. On consultera l'édition lyonnaise du même texte, avec quelques variantes, sur l'exemplaire en mode image disponible en ligne sur le site Gallica de la BnF.

DISCOURS
VERITABLE DE LEXECUTION FAICTE
de plusieurs traystres & sedicieux
de la ville de Rouen

Faict par le commandement de Monseigneur le
Chevallier d'Aumalle, faict le vendredy 23
de Fevrier 1590.

vers l'image agrandie (55ko)

DISCOVRS
veritable de tout ce qui cest faict & passé en la ville de Rouen.


MESIEURS,

Je ne voulu faillir de remarquer & mettre en memoire les traysons de ceux qui tiennent le party du Roy de Navarre pour donner exemple aux autres villes Catholiques de prendre garde à ceux qui leur commande scavoir s'ils sont gens de bien, & vrait Catholiques & pour soutenir la foy & saincte Union juree par les Princes & gens de bien.

Or je vous veux advertir ce qui c'est passé l'undy dix neuf-viesme jour de Fevrier à la ville de Rouen, de plusieurs Capitaines traistres & sedicieux de la foy, lesquels tenoient le party du Roy de Navarre cestant saisis du chasteau près de la cohue situées en un des bous de la ville tirant du costé de Dieppe, & estoit les traistres de dedans nommes le capitaine Louys & le capitaine La Cave & trois autres, lesquels ayant promis & juré eux & leurs adherens de livrer le chasteau & la ville au Roy de Navarre, dont en estoit le premier conducteur le Batard d'Alegre, tellement qu'il executerent le Lundy jour assiné leur entreprise, en entrant dans le chasteau criant a haute vois, vive le Roy vive le Roy, dont fut esmeu le lieutenant dudit chasteau estant encore couché soudain se leve sottant par une fenestre, & va criant parmy la ville aux armes messieurs barricade-vous me amis car nous sommes trays, le capitaine Louys a livrer le chasteau à nos ennemis, & soudain en fut advertir monsieur de la Londe, luy disant que le batard d'Alegre estoit entré dedans, par le consentement & trayson du capitaines Louys & du capitaine la Cave & qu'il attendoit le secours du Roy de Navarre qui y devoit venir en diligence en personne, dont monsieur de la Londe fit soudain barricadé tout aux environs du chasteau mettant force mousqueterre & harquebuziers alentour dudict chasteau pour tirer dans les fenestres tellement que l'ennemy ny ausoit mettre le nes, puis apres, il fit amener cinq piece de canon dont il en fit braquer trois d'un costé & deux de l'autre, puis les fit battre le Mardy furieusement, puis soudain envoya advertir monssigneur le Chevallier d'Aumalle, lequel en estant adverty s’y achemina diligemment, & y arriva le lendemain ensuivant qui estoit le Mecredy, dont les habitans de Rouen fure bien resjouis de sa venue, alors les ennemis & traystres du chasteau estant advertis de la venue de mondict seigneur le Chevallier d'Aumalle, il luy demanderent à parlementer, lequel il leur accorde, leur demandant ce qu'ils voulois dire, lors il dirent qu'ils quitteroient le chasteau & le renderoit entre les mains de mondict seigneur, moyennant qu'il leur balla vingt mille escus, auquel mondict Seigneur fit response qu'il leur alloit conté a coups de canon, & soudain commande au Canonié de tiré vivement & qu'il n'espargnat rien, ce qui fait & les bat de furie, dont ceux de dedans redemanderent à parlementer pour la seconde fois ce que mondict Seigneur leur accorde, & demanderent encorent de rechef dix mille escus pour quitter la place, dont mon signeur leur fit responce qui leur donneroit des coups de canon tant qu'ils voudrois & les fit canonner de rechef vivement dont demanderent encore à parlementer pour la troisiesme fois, & demanderent seulemant quatre mille escus, auquel mondict seigneur fit responce qui ne leur balleroit rien & qui vouloit faire pendre les traystres qui estoit dedans, soudain mondict Seigneur le Chevallier d'aumalle commande que l'on tire, & que l'on face breche, & qu'il y vouloit entrer le premier, ce que l'on faict, & tire on vivement, dont ceux de dedans voyant la breche grande & preste à entre dedans le chasteau, commancerent à crier miséricorde, & principalement les Chefs & capitaines, voyant leurs derniers jours approcher, ce rendant le Jeudy à heure de dix heures à la mercy de Monseigneur le Chevallier d'Aumalle, dont monseigneur entra le premier dedans & abbattit une pierre, faisant commandement aux habitans de la ville de Rouan qu'ils eussent à abbattre du Chasteau ce qui commandoit dans la ville, puis il fit prendre le Batard Dalegre & les cinq capitaines qu'ils avoient trayr le chasteau & la ville, & mettre prisonniers dont l'un des capitaines estant prisonnier se pendict de rage, & le lendemain qui estoit le Vendredy vingetroisiesme jour de Fevrier, monseigneur le Chevallier fit pendre & estrangler les quates autres Capitaines avec celuy qui cestoit pendu en la prison, en la presence des habitans de la ville & pour servir d'exemple à ceux qui veullent estre traystre à la foy Catholique, & aux Princes & Seigneurs de la saincte Union.
  
Voyla messieurs tout ce qui cest passé en la ville de Rouan, vous advertissant que le Roy de Navarre estoit party de devers Poicy pour venir donner secours aux traystres qui estois au chasteau, mais quant il sceut que Monseigneur le Cheaullier d'Aumalle y estoit & qu'il avoit reprins le chasteau & avoit fait pendre les traystres qui tenoient son party, il rebroucha chemin devers Dreux.

Nous prirons pour tous les Princes Catholiques : à ce que Dieu les preserve, & unisse ensemble en telle amitié & intelligence, que le peuple se resantant de ceste saincte Union & concorde puisse vivre en paix avec Dieu & son prochain.
  
Nous prirons pour le Conseil des Princes : à ce que ceux qui ont cest honneur d'y estre appellez, prevoyent si sagement & en toute loyauté aux affaires publiques, que puissons veoir florir ce Royaume en union & foy & religion Catholique, avec ferme paix, sans schismes, division ny partialité.

Nous prirons Dieu, qu'i veuille recevoir en sa sainte protection la noblece de France, & la rendre si affectionnee envers le Roy Charle de bourbon son Prince naturel & Seigneur Souverain (soubs l'auctorité duquel elle porte le glaive) que l'obeissance & force luy demeurent partout, au bien & repos du public.

Nous prirons pour la Gendarmerie, à ce que Dieu la preserve de tout encombre & face la grace de si bien s’employer au service des Princes Catholiques & de la saincte Union, sans oppression des subjets, quelle en reçoive guerdon immarcecible aux siecles des siecles. ainsi soit-il.

FIN.

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