DUBOSC, Georges (1854-1927) : Les sobriquets gastronomiques en Normandie, (1927).
Saisie du texte et relecture : O. Bogros pour la collection électronique de la Médiathèque André Malraux de Lisieux (07.V.2004)
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Texte établi sur l'exemplaire de la médiathèque des Chroniques du Journal de Rouen du lundi 18 avril 1927.
 
Les sobriquets gastronomiques en Normandie
par
Georges Dubosc

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Maintenant que les jeûnes du carême et les « grandes pénitences » sont terminés, il est permis de proclamer que la Normandie, comme disait le proverbe de jadis, est « bombancière ». Elle est trop bien favorisée du ciel, pour n'avoir point toujours aimé les liesses, les bon repas et la chère délicate. Elle ne voudrait point l’avouer, que les sobriquets gastronomiques distribués par les villes et les paroisses les unes aux autres, le prouveraient de façon amusante. Il est peut-être curieux grâce au blason populaire, grâce à certaines publications traditionalistes de les recueillir, avant que ces expressions ne disparaissent pour toujours.

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Voici, par exemple, parmi ces sobriquets si nombreux dans le langage populaire, Les Mangeux de soupe de Louviers, symbolisés par une petite statuette, placée sur le côté Sud de l’Eglise Notre-Dame, montrée à tous les visiteurs s'intéressant encore aux traditions populaires et aux faits historiques qu'elles évoquent. Les Mangeux de soupe de Louviers, représentés par ce petit marmouset sculpté sur un chapiteau, contemplant d'un air mélancolique l’écuelle brisée tenue à la main, rappelle que le 6 juin 1591, les habitants de Louviers, à l’heure de midi, à l’heure de la soupe familiale, fumant dans les assiettes, s’étaient laissés surprendre par le maréchal de Biron, aux ordres de Henri IV. De là, ce sobriquet satirique de Mangeux de soupe, donné aux habitants de la petite cité conquise pendant qu’elle était à dîner et décoché par la malice populaire. Soutiendra-t-on que la petite sculpture ainsi désignée, parait être antérieure à cette date de 1591 ? M. P. Dibon, dans son Essai sur Louviers, vous répondra que bien souvent les imagiers-sculpteurs de nos églises ont perpétué souvent très postérieurement un style ou un motif créé antérieurement. Et c’est ainsi qu'aurait survécu la légende historique du Mangeux de soupe de Louviers !

A côté des Mangeux de soupe de Louviers, si attentifs à leur repas qu'ils en oublient leur propre défense, voici les Friands de Caudebec, titre remontant au temps luttant au temps où la vie policée et heureuse se déroulai autour d'une table bien servie, dans l'ancienne capitale du pays de Caux. Qui pourrait, du reste, faire un crime aux Caudebécais d’être friands ? Friandise n’est point un défaut et, au contraire, témoigne d’un certain goût. Il est vrai que ceux qui, vers 1780, lançaient ce sobriquet contre les braves habitants de Caudebec, le faisaient par vengeance politique contre la situation prospère de la petite ville.

Aussi bien, Caudebec-en-Caux ne méritait-elle pas sa réputation gastronomique, par ses fritures d’éperlans de Seine, frétillants et argentés, qui figurent depuis longtemps dans ses armoiries ; par ses délicieuses pâtisseries ; par ses fruits cueillis jadis dans son domaine du Calidu, et par sa fabrique de moutarde à l’estragon, rivale de celle d’Yvetot ?

Faut-il encore citer parmi ces sobriquets généraux, les Lèche-plats de la Ferrière, petit village du côté de Domfront ? Dans les campagnes, jadis, la civilité et la politesse obligeaient les convives à ne pas « torcher les plats et les assiettes ». Agir autrement, c’eût été presque reprocher à l’amphitryon de ne point nourrir suffisamment ses convives. Emportés par leur gourmandise, les gens de Ferrière ont-ils transgressé les habitudes ordinaires de la Basse-normandie, ce qui leur aurait attiré de la part de leurs voisins l’épithète de Lèche-plats de la Ferrière ? Il en fut de même pour les Mâqueux de Gournay, les mangeurs ou plutôt les mâcheurs, qui témoignaient chez les Gournaisiens d’une véritable réputation de gourmandise, comme aussi pour les Gourmands de Montivilliers, sobriquet qui paraît bien avoir été une riposte de la part des Friands de Caudebec, dont nous avons parlé plus hauts. En passant, rappelons, à propos de Montivilliers, l’expression proverbiale bien amusante : « Il est de Montivilliers, il relève de Madame », qui s’applique aux maris n’étant pas… maîtres au logis. C’était une allusion à Madame, l’abbesse de Montivilliers, exerçant sa juridiction ecclésiastique sur cent vingt-huit paroisses normandes, notamment sur Saint-Paul et Eauplet, auprès de Rouen.

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N’allons pas passer sous silence Les Gourmands de Grestain, dans l’Eure, sur les bords de l’Estuaire, non loin de Conteville, le pays de Jean Revel, le grand romancier normand. Les Gourmands de Grestain ! Le sobriquet s’adressait surtout aux moines de l’ancienne abbaye, célèbre par ses immenses cuisines et ses garde-mangers copieusement approvisionnés !

Dans ses Lettres d’un voyageur à l’embouchure de la Seine, Le Masson de Saint-Amand, qui a donné une description fort savoureuse d’un dîner de noces normand, a d écrit le garde-manger de Grestain :

« Il formait, dit-il, un long couloir orienté de façon convenable et aéré des deux bouts, où pendaient aux crochets, les provisions. Dans le bas, une source en parcourait toute la longueur, permettant d’engraisser et de conserver tous les poissons d’eau douce. A une extrémité du garde-manger, était un réservoir d’eau salée où le poisson de mer encore vivant, les homards, les langoustes, les crabes, les huîtres étaient déposés avant de paraître sur la table des moines. »

N’est-ce pas eux aussi qui, à l’exemple de Gorenflot, le moine créé par la verve d’Alexandre Dumas, faisaient en temps de carême, traverser à la nage la rivière de Risle, qui vient se jeter de ce côté, par les boeufs et les moutons ? Grâce à ce baptême improvisé, ils changeaient en quelques secondes de nature et devenaient un aliment… maigre. Le canard et les oies étaient même dispensés du trajet aquatique, au bénéfice de leurs estomacs ! Etait-ce vrai ? Tout au moins, cette anecdote médisante était populaire dans le pays et il n’en fallut pas plus pour y implanter la légende des Gourmands de Grestain.

Voici encore Les mangeurs de pois de Pont-Audemer, ainsi gratifiés d’un sobriquet amusant par les habitants du faubourg Saint-Aignan, sur la rive droite de la Risle qui les séparaient des véritables Pontaudemériens. Cette séparation avait été la cause principale du sobriquet lancé par les faubouriens. De par sa délimitation primitive fort rigoureuse, Pont-Audemer – cité comme on voit peu, cité comme on en voit guère – faisait partie du diocèse de Lisieux, dédié à Saint-Pierre. A ce titre, notre bonne ville de tanneurs ne jouissait pas de la faculté de manger de la viande, les samedis, compris entre Noël et la Purification.

Au contraire, le faubourg Saint-Aignan, dépendant du diocèse de Rouen, dédié à la Vierge, avait le privilège de faire gras. Aussi bien, plutôt que de franchir le pont et d’aller s’asseoir aux tables réputées des hôtelleries de Saint-aignan, les bons bourgeois de Pont-Audemer, pour narguer leurs voisins, se rendaient ce jour-là, manger sous le pouce, à la barbe de leur voisins, le saucisson, comme eux, d’origine intra muros.

N’était-ce pas une véritable provocation ? Et le sobriquet dédaigneux de Mangeurs de pois, n’était qu’une riposte, comme dans bien des cas en use le « blason » populaire.

Canel, auquel nous avons fait de très larges emprunts a rappelé que l’épithète Mangeurs de pois, figure dans un poème anonyme sur une petite histoire de procession religieuse :

« Tous les ans, on promenait par les rues de Pont-Audemer, la statue de Saint Sébastien, invoqué contre la peste. C’était le privilège de la paroisse principale, celle de Saint-Ouen. Les curés des trois paroisses secondaires se mirent dans l’esprit de contester ce privilège, revendiqué par le vicaire Vitrel, de l’église Saint-Ouen. Un beau jour de procession, sur le pont de Rouen, bataille avec le clergé du faubourg Saint-Aignan, bataille, et la statue de Monsieur Saint Sébastien, dans la lutte, est précipitée dans la Risle ! Même bagarre entre deux processions rivales, sur un pont, entre Longpaon et Darnétal, près de Rouen, qui, depuis lors fut désignée sous le sobriquet de Terre maudite : « On y jette le bon Dieu à l’eau ».

A la suite de la procession de Pont-Audemer, grand scandale, procès très long, maintien du curé de Saint-Ouen dans son droit, et comme tout finit par des chansons, pour perpétuer le souvenir de l’évènement, on tourna quelques couplets. L’un justement rappelle le sobriquet des bonnes gens de Pont-Audemer :

« L’gros Vitrel, su Mangeux de pois,
Lui dit : « Tu ne l’auras pas :
Je l’mettrai plutôt dans ma pouquette
Turlurette ! ».

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Voici encore quelques Mangeurs, notamment Les Mangeurs d’oreilles de Montivilliers, mais ce sobriquet, paraît-il, n’aurait rien de gastronomique. Il viendrait de ce qu’en un jour de colère un Montivillon arracha avec les dents l’oreille d’un Harfleurais, les deux villes voisines étant souvent en querelle. Plus sérieux est le sobriquet des Mâqueux de salade d’Argentan, rappelant que ces braves paysans bas-normands allaient vendre leurs légumes jusqu’à Paris, et parfois, quand ils n’avaient rien débité, se nourrissaient sur leur fond. De là, le surnom dont joyeusement les Compagnons du Tour de France les avaient affublés. C’est un peu pour la même cause que les bons paysans d’Avoines, près d’Argentan, avaient été baptisé Les Parisiens d’Avoines, parisiens « à gros bec ».

Cherchons encore s’il existe quelques autres Mangeux normands. Savez-vous qu’autrefois les Rouennais, appelés surtout normands bouilleux, c’est-à-dire aimant la bouillie de blé ou de sarrasin, étaient aussi dénommés Les Mangeurs soupe aux porreaux ? N’allez pas croire qu’ils étaient comme les Picards et qu’ils aimaient particulièrement à déguster les poireaux dans la soupe ou coupés en petits morceaux et enrobés dans la pâte croustillante d’une flamiche ! Non, ce sobriquet de Mangeurs de porreaux, provenait seulement de la façon rude, gutturale, rocailleuse dont les purins de Martainville ou de Saint-Nicaise prononçaient le mot porrrreaux, en faisant rouler les r comme les méridionaux, au lieu d’adoucir la prononciation des porrrreaux pour en faire des poireaux, comme à la Comédie-Française !

A côté des Mangeurs de soupe aux porreaux de Rouen, qui n’existent pas dans la réalité, voici, par contre, les Mangeux de lard d’Honfleur, ou plutôt du faubourg de Saint-Léonard, qui, eux, étaient de véritables amateurs de la bonne viande de l’animal chanté par Monselet :

« Car tout est bon en toi, car tout en toi se mange
O porc délicieux, animal roi, cher ange. »

Cette célébrité de mangeurs et dégustateurs de cochonnailles « de chaircuiterie » leur était venue de ce qu’à Noël, à la saint Martin et à Pâques, jours de réjouissance domestique, ils tuaient un ou plusieurs cochons élevés pendant l’année. On en faisait des jambons, puis des aunes de boudin, des saucisses, envoyés en présents aux parents et amis, qui les mangeaient en famille aux grandes fêtes. Le lard, moins considéré que jadis sur les hautes tables, bien qu’il entre dans l’alimentation quotidiennes des populations urbaines, était autrefois très apprécié. Il y avait jadis à Rouen, le grand festin du Parlement de Normandie, qui s’appelait le Repas du cochon. La tradition du « cochon de lait », à la peau dorée et délicate et sa dégustation au commencement du repas, s’était maintenue dans bien des cérémonies, par exemple dans le banquet annuel de la compagnie des Sapeurs-pompiers de Rouen. Il y a encore à Paris, un dîner d’anciens élèves du Lycée de Rouen, que présidait jadis avec verve Georges Visinet, et qui s’appelle le Banquet du cochon ! Legrand d’Aussy, qui, dans sa Vie privée des Français, a réuni tant de documents sur la vie gastronomique de nos bons aïeux, a écrit, « qu’à Pâques, on se décarêmait avec un jambon, friandise par excellence, que l’on prenait soin de faire bénir à l’église. » D’après Canel, le tranquille habitant de Saint-Léonard, « faisait donc assommer, à la sainte Catherine, le cochon qui devait être sa nourriture principale jusqu’eau renouveau ».

D’autres mangeux... de tout ce qui se mange, sont parfois dissimulés sous des noms ou termes empruntés aux patois locaux. Voici, par exemple, dans le Cotentin, les Bartias ou Barettes de Morigny ; ces deux locutions normandes sont synonymes de « mangeurs de beurre ». Des paysans de Courson, rencontrant un jour ceux de Morigny, revenant de la procession à une heure fort avancée, les plaisantèrent, dit-on, en les accusant d’avoir passé le temps à manger des tartines de beurre, car dans toute cette région, jusqu’à Isigny, le beurre est délicieux. D’où le sobriquet.

Comme sobriquets populaires gastronomiques, en cherchant bien encore, on trouverait des termes plus courts, mais dans leur concision, tout aussi expressifs. Connaissez-vous, par exemple, les Crablins d’Harfleur, terme normand qui était digne de figurer dans l’admirable roman L’Ex-voto, de Lucie Delarue-Mardrus, la synthèse merveilleuse et puissante de la vie de l’entrée de l’estuaire.

Dans cette région de la vase, du vent de mer, de l’embrun, le crablin, c’est tout le poisson de mer, le crustacé, les coquillages, tout ce que les méridionaux de Marseille appellent les « fruits de mer », frutti di mare, et que les pêcheurs abandonnent au rebut. Le crablin, ce sont les pourris, les tourteaux, la salicoque, le « bouquet »…. défraîchis, les poissons avariés, dont personne ne voudrait, si on ne s’en servait pas comme engrais. C’est un terme de dénigrement, une injure très vraisemblablement lancée par les Terriens de Montivilliers, contre les anciens marins d’Harfleur, bien déchue aujourd’hui de sa renommée maritime et de son importance parmi les cités normandes, où elle comptait au premier rang. Aujourd’hui, les Harfleurais ne sont plus que du… crablin, comme aussi les pauvres pêcheurs de Berville, que les terriens du voisinage traitent aussi de la même façon. Le sobriquet dont sont ainsi affublés les Bervillais, viendrait de l’odeur désagréable s’attachant à leurs vêtements, par suite de l’usage qu’ils ont de conserver le crablin pour amender les terres, et aussi pour nourrir des pourceaux et des canards. Ces animaux se présentaient sous un bel aspect, … mais il fallait plus d’un mois d’une nourriture différente, pour détruire la fétidité contractée sous l’influence du crablin. Aussi dans les contes anciens, le canard de Berville était-il destiné à devenir la punition éternelle des malheureux trépassés en péché de gourmandise !...

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Les Crablins d’Harfleur pourraient donner la main aux Pêcheurs de coques du Mont-Saint-Michel. La coque, à tout prendre, est un coquillage de la grosseur d’une noix, de la forme d’un coeur, un peu semblable aux délicieuses coquilles Saint-Jacques, qu’on vend maintenant dans nos poissonneries, avec deux valves blanches ou relevées d’un incarnat pâle. Sa pêche était le gagne-pain des enfants et des femmes du Mont-Saint-Michel et de la côte, pénible et chétif métier, puisque le proverbe « J’aimerais mieux pêcher des coques au Mont-Saint-Michel », le représente comme le superlatif de la misère. Dans un joli roman, La Fée aux Miettes, Nodier a décrit la pêche aux coques comme on pourrait décrire la pêche aux étrilles sur les sables du Calvados :

« L’attirail du pêcheur, dit-il, est tout simple. Il se réduit à une résille à mailles serrées, qui pend sur son épaule et dans laquelle il jette par douzaine, son gibier retentissant et puis à un bâton armé d’une pointe de fer un peu crochue qui sert à sonder le sable et à le retourner. Un petit trou cylindrique, seul vestige de la vie, que les vagues aient respecté en se retirant, lui indique le séjour de la coque et d’un seul coup de pique, il la découvre et l’enlève. C’est de là que parfois la coque, montait à la surface de l’Océan sur une des écailles voguant en chaloupe, et sous l’autre dressée comme une voile ».

Et Nodier conclut que « rien n’est délicieux comme la coque fricassée avec du beurre d’Avranches et des fines herbes ». Faut-il ajouter que par un privilège de Charles VI, les gens du Mont-Saint-Michel avaient le droit de vendre ces coquilles aux pèlerins comme « enseignes » et preuve de leur visite au Mont. Bien entendu, ce commerce de coquilles de pèlerinage était libre, sauf une imposition de 12 deniers pour livre en faveur du Roi !

Est-il besoin d’affirmer que d’autres comestibles ou victuailles ont fourni, eux aussi, des sobriquets nombreux et variés aux bonnes populations des villages de Haute et Basse-Normandie, valant mieux parfois qu’on ne le croirait par ces dictons satiriques. On a ainsi les Navets de Carcagny, près de Caen, ainsi dénommés parce que l’on ne les cultivait guère [que] dans cette commune ; les Navets de Fontenay, près d’Argentan, et les fameux Navets de Martot, dans l’Eure. Et nous en passons et des meilleurs : les Gigots de Beuzeville, près de Pont-Audemer ; les Oies de bures ; la Baleine de Bernières, près de Caen, qu’on dégustait au Moyen Age ; les Bourres et les Bourrettes de la Foire Saint-Mathieu, à Bourg-Achard ; les Pimperniaux de l’Eure une sorte de petite anguille, cité dans le Dict de l’Apostoile ; la Soupe au savouret, soupe très maigre où on fait resservir plusieurs fois un os de boeuf nommé le savouret, et Les Savates du Gast, un joli endroit, près de Vire, où on fit manger à un gourmand de l’endroit de la savate pour des tripes à la mode de Caen !!!

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On en citerait bien d’autres, mais voici un de ces dictons qui a acquis une véritable renommée littéraire. C’est le dicton : Vive Valognes pour le rôti, que Lesage a introduit dans Turcaret. A un moment, Mme Turcaret se vante d’être la première qui ait porté des pretintailles à Valognes, comme aussi d’y avoir donné souvent des repas. Les cuisiniers ne savent, à la vérité, faire aucun ragoût, mais ils tirent les viandes si à propos, qu’un tour de broche de plus, elles seraient gâtées. Et le marquis répond : « C’est l’essentiel de la bonne chère. Ma foi. Vive Valognes pour le rôti ! » qui est resté proverbial dans toute la Normandie.

GEORGES DUBOSC


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